RDC : Le Dalogue tourne à la foire aux postes de pouvoir, selon La Libre Belgique

Publié le par Jean-Cornelis Nlandu-Tsasa

La photo que La Libre publie sur une page entière
La photo que La Libre publie sur une page entière

Bruxelles, 08/09 - Le Dialogue politique, un forum destiné à établir un calendrier électoral conforme à la Constitution, s'est ouvert sous de mauvais auspices, estime La Libre Belgique dans son édition de jeudi 8 septembre, sur deux pages dont une avec une grande photo de délégués à ces assises.

Sous le titre "Le président kabila est hué par la foule au stade", Marie-France Cros, qui débute par une incise, explique que le cri est sorti de 80 000 poitrines : "Kabila, sache-le : le mandat est fini". C'était dimanche, au stade des Martyrs, où l'équipe nationale congolaise dominait celle de Centrafrique. Mais dans la liesse de la victoire, ce n'est pas la gloire des Léopards que le public chantait mais "Kabila yebela : mandat esili", écrit notre consœur en lingala dans le texte. Et contrairement à l'habitude, les supporters n'ont pas fêté leur victoire dans les rues, en sortant du stade. "Exceptionnel" nous disent plusieurs Kinois, ajoute le journal sans autre précision.

La veille, poursuit le quotidien belge, Olive Lembe Kabila n'était pas arrivée à remplir plus de la moitié du stade Kibassa Maliba (500 places), dans un quartier populaire de Lubumbashi, alors qu'elle y distribuait des colis scolaires. Et l'avant-veille, à Kindu (Maniema, province considérée pourtant comme le dernier fief fidèle au président Kabila), un match de foot opposant l'équipe locale à celle de Katumbi a tourné à la manifestation pour "Moïse", dont le nom a été scandé par les dix mille spectateurs, souligne notre consœur.

"C'est un signe clair", selon La Libre Belgique citant l'un de ses interlocuteurs qui explique : "Comme l'a été le bon suivi du mot d'ordre 'écoles mortes' du Rassemblement de l'opposition, lundi, avec un large boycott de la rentrée des classes. Les gens l'ont bien suivi à la fois parce que ça leur permet de reporter à plus tard les frais scolaires, alors que les prix ont grimpé et que la situation est très dure pour beaucoup - mais les autorités ne s'en occupent pas - et parce que tout le monde a peur des troubles. Tout le monde dit que ça va finir par barder parce que Kabila n'a pas l'intention de partir" à la fin de son mandat, le 19 décembre.

Pour le quotidien, l'ouverture du Dialogue, le1er septembre, n'apparaît pas comme une solution. D'abord parce que l'essentiel de l'opposition en est absente, le facilitateur Edem Kodjo, ayant en effet ouvert la réunion sans attendre que soit rencontrée une seule des conditions mises par le Rassemblement de l'opposition à sa présence.

Ainsi, précise le journal, seuls quatre prisonniers d'opinion ont été libérés (mais sont toujours poursuivis) sur la centaine de prisonniers politiques dont la libération était exigée. Le quotidien s'étonne par ailleurs que M. Kodjo, vu à Kinshasa comme "partial", "dépassé" ou "incompétent", ait accepté sans le faire vérifier une liste du gouvernement de 24 détenus à libérer, dont 20 n'étaient même pas prisonniers. Kodjo a aussi accepté, pour siéger au nom de l'opposition, des gens dont il n'a pas vérifié qu'ils étaient bien mandatés par leur parti et beaucoup ne le sont pas, note La Libre.

Distribution des postes prolongation du mandat de Kabila en échange

La société civile réclamait une retransmission en direct pour surveiller les participants, mais le Dialogue a lieu "presque à huis clos", dit un Kinois, dans le camp militaire "Cité de l'OUA", sous la surveillance de la garde présidentielle, ce qui a muselé la liberté d'expression, selon le quotidien qui ajoute que des sommes importantes sont versées aux participants au titre de "per diem".

Par ailleurs, ajoute-t-il, à deux reprises le nombre total de participants a été augmenté, passant de 150 à 200, puis à 280, parce que nombreux sont les politiciens qui veulent "y être" tant il apparaît que la réunion va, non pas préparer des élections crédibles et conformes à la Constitution, comme annoncé, mais distribuer des postes de pouvoir en échange d'un accord à une modification de la législation interdisant la prolongation à la présidence de M. Kabila.

Le quotidien belge cite le député de la Majorité Thomas Lokondo qui estime que la feuille de route du dialogue "est pratiquement la photocopie certifiée conforme des concertations nationales" de 2013 destinées à créer une "union" nationale derrière Kabila après la "méga-fraude" électorale de 2011 et dont une seule recommandation, sur une centaine, avait été exécutée : le remaniement du gouvernement pou offrir des postes à des "représentants de l'opposition" ayant participé à ces assises. Pour le journal belge, cela renforce l'impression que le Dialogue n'est qu'une nouvelle tentative pour maintenir illégalement Joseph Kabila au pouvoir, ce qui a poussé l’Église à menacer, mardi, de se retirer s'il n'y avait pas "respect absolu" de la Constitution.

Jeu ambigu de Pretoria et Premier ministre de Kabila pour "Kamerhéon"

Enfin sous deux sous-titres, "Le jeu ambigu de l'Afrique du Sud" et "Vital Kamerhe, l'opposant 'Kamerhéon'", La Libre Belgique fait remarquer que certains Congolais sont intrigués par le jeu ambigu de Pretoria, la présidente de la commission africaine ayant désigné Kodjo, alors que l'opposition réclamait une facilitation de plusieurs représentants de la Communauté internationale, étant l'épouse divorcée du président Jacob Zuma.

Selon le quotidien belge, celui-ci veille aux intérêts de l'Afrique du Sud, Pretoria intervenant avec un contingent armé des Casques bleus au Kivu et ayant par ailleurs signé en 2013 un traité international pour l'agrandissement du barrage d'Inga, avec un accès privilégié à l'électricité produite pour assouvir son besoin urgent en vue de son développement, alors que Khulubuse Zuma, neveu du président sud-africain, a une société d'exploitation du pétrole du lac Albert, dans le nord-est du Congo.

Concernant Vital Kamerhe, le journal, qui brosse le cursus de cet "opposant" de 57 ans ayant a travaillé depuis l'époque de Mobutu avant de faire campagne pour Joseph Kabila, souligne qu'il avait acquis ses lettres de noblesse dans l'opposition lorsqu'il avait organisé les protestations contre le projet d'un troisième mandat à Joseph Kabila, qui avaient été réprimées dans le sang avec une quarantaine de morts, avant que la gloire montante de Moïse Katumbi, qui venant de quitter la majorité pour s'opposer au 3ème mandat, vienne déplacer Vital Kamerhe de l'échiquier politique.

Pour La Libre, désormais c'est le Katangais qui apparaît comme l'allié de Tshisekedi dans la conquête du pouvoir et Kamerhe, ne pouvant plus espérer accéder à la fonction suprême par l'opposition, adopte une courbe rentrante qui lui vaut d'être surnommé "Kamerhéon" à Kinshasa. Le journal rappelle : il refuse en juin de s'associer au Rassemblement d'opposition créé à Genval et participe en septembre au Dialogue honni par l'essentiel de l’opposition. "Je pense qu'il vise à présent, en échange, un poste de Premier ministre de Kabila", suppute un observateur à Kinshasa cité par notre consœur.

Deux attitudes de "Kamerhéon" au DialogueDeux attitudes de "Kamerhéon" au Dialogue

Deux attitudes de "Kamerhéon" au Dialogue

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