Violences au Bas-Congo : Le ministère public devrait se saisir du dossier

Publié le par Cornelis Nlandu-Tsasa

Violences au Bas-Congo

Le ministère public congolais, s'il existe, devrait se saisir du dossier

 

Kinshasa - Au moins cent personnes, dont de nombreux adeptes du mouvement Bundu dia Kongo (BDK), ont été tuées lors de l'opération de police en février-mars au Bas-Congo, en République démocratique du Congo (RDC), selon l’ONU, qui a dénoncé vendredi un «usage excessif de la force», ce qui, dans un pays qui se dit "démocratique" devrait pousser le ministère public à se saisir du dossier. Selon les pricipes du droit en effet, le ministère public est chargé de traquer les infractions qui, manifestement, sont signalées en grand nombre dans le dossier.

Mais dans un pays comme la RDC où la magistrature semble être inféodée jusqu'au cou, on se limite plutôt à traquer les infractions concernant les opposants et les faibles parmi la population. C’est la première fois depuis ces violences que l’ONU communique officiellement un bilan et liste une longue série de violations des droits de l’Homme perpétrées par la police nationale congolaise (PNC), dont le responsable devrait être poursuivis en justice, mais aussi des violences attribuées au BDK, dans un rapport de 36 pages rédigé par une équipe multidisciplinaire du Bureau de la Mission de l’ONU en RDC (Monuc) pour les droits de l’Homme.
Le gouvernement, rompu dans la langue de bois comme au vieux temps du marxisme-léninisme, avait fait état sans se gêner d'un «bilan officiel de 27 morts, y compris trois policiers». La présente enquête vient de confondre Kinshasa en concluant qu’au moins 100 personnes, principalement des partisans du BDK, ont été tuées pendant les opérations de la PNC lancées le 28 février 2008 dans la province du Bas-Congo (ouest)», affirme le rapport.
«Ce lourd bilan (...) a été principalement causé par l’usage excessif ou illégitime de la force par la PNC, et, dans quelques cas, par des exécutions arbitraires», poursuit le texte, citant des «cas d’exécutions de détenus» et le fait que des témoins affirment avoir vu la PNC jeter des cadavres dans une rivière «pour chercher à dissimuler des preuves». Le rapport liste aussi des actes de «torture», des «traitements dégradants», des pillages et des incendies d’habitations ou d’églises du BDK, dans différents localités de la province.

Les enquêteurs rappellent que l’opération de police, destinée à «restaurer l’autorité de l’Etat», avait été lancée après des mois de tension au Bas-Congo, où, en février, deux hommes avaient été «brûlés vifs par le BDK» qui les accusait de sorcellerie. Ce mouvement politico-religieux affirme lutter pour la défense des intérêts du peuple Kongo et certains de ses leaders prônent la restauration de l’ex-royaume Kongo, qui s’étendait au XVe siècle sur l’actuel Bas-Congo, une partie de l’Angola, du Congo voisin et du Gabon. Le rapport de l’ONU rappelle que dans certains villages, le BDK s’était «arrogé les pouvoirs de l’Etat» et était qualifié d’«organisation terroriste» par certaines autorités locales.

Toutefois, les enquêteurs soulignent que l’emploi de mitrailleuses légères, la «destruction systématique des églises et maisons du BDK» et l’arrestation de plus de 150 adeptes pourraient indiquer que les autorités avaient «comme objectif de réduire considérablement la capacité opérationnelle du BDK», interdit fin mars par le gouvernement.

L’équipe de l’ONU a aussi visité plusieurs localités où se trouvaient des fosses communes. Elle a constaté dans certains cas, comme à Manterne (Sud de la province), que «bien qu’aucun corps n’y ait été retrouvé, des preuves matérielles et physiques, ainsi que des témoignages, peuvent indiquer que des corps y ont été enterrés et ont ensuite été déplacés». La Monuc recommande l’ouverture d’une enquête par la justice congolaise, appelle le gouvernement à «prendre des mesures» afin de mieux former et équiper sa police, et le BDK à «reconnaître la légitimité» des autorités congolaises.
A lecture du rapport, qui fait apparaître une volonté délibérée de "massacrer" des civils désarmés, acte que certains ne-Kongo qualifient d'ailleurs de "génocide", on ose croire que la Belgique et la CPI passées championnes du monde de Justice délivreront rapidement des mandats d'arrêt pour juger les crimes contre l'humanité ainsi commis à vaste échelle en RDC, particulièrement au Bas-Congo. Ce qui, pour ceux qui savent lire les signes, devrait demeurer un rêve irréalisable lorsque l'on sait que pour la communauté internationale, les morts en RDC ne sont jamais morts.

Le Signal/ACP

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