Commentaire : UDPS, l’éternel gâchis

Publié le par Jean-Cornelis Nlandu-Tsasa

Jean-Cornelis Nlandu
Jean-Cornelis Nlandu

Le 22 septembre 2015, la présidence de l’UDPS radiait de ses registres le bouillant Dr François Tshipamba Mpuila et 25 autres frondeurs. Ils venaient de se rendre coupables d’avoir émis un son de cloche contraire à celui autorisé. François Mpuila est un activiste bien connu sur les trottoirs de Bruxelles qu’il a arpentés sans discontinuer depuis le régime de Mobutu. D’abord adjoint à Justine Kasa-Vubu, il prend les commandes de l’UDPS/Benelux dès la défection de la fille du premier président congolais, qui avait tourné le dos à la mendicité pour embrasser l’AFDL, à sa prise de pouvoir le 17 mai 1997.

Bien connu pour la virulence de ses propos vis-à-vis du pouvoir, de Mobutu d’abord puis de Kabila père et fils, Mpuila aura littéralement sacrifié ses belles années de vie au service de la cause de l’UDPS et d’Etienne Tshisekedi, jusqu’à hypothéquer sa propre santé. il pouvait passer des nuits entières à rédiger des pamphlets qu’il distillait dans les messages e-mails. Ce qui lui a même valu un "procès en diffamation" intenté par Louis Michel, alors ministre des Étrangères. Tout Matonge de Bruxelles était présent à l'ouverture, le 1er septembre 2006 à Nivelles, de ce procès hautement médiatisé et que le volubile Mpuila avait présenté dans son invitation sur les réseaux sociaux comme "le Procès de Louis Michel contre le Peuple Congolais”.
Mais comme Justine Kasa-Vubu, révoquée du parti en 1997, tout l’activisme et toute la virulence qu’on reconnaît au Dr Mpuila ne lui auront finalement servi à rien du tout, avec sa radiation du parti. Comme quoi, la révolution a cette mauvaise manie de bouffer ses propres enfants.

Etienne Tshisekedi pourtant élu Premier ministre

L’UDPS n’a jamais conquis le pouvoir 33 ans après sa création le 15 février 1982, d’abord en clandestinité puis avec pignon sur rue à la mort du MPR parti-État le 24 avril 1990 et ce, malgré tout le crédit sympathie dont il dispose auprès de la population congolaise. L’intolérance et le radicalisme tous azimuts affichés avec une constance d'horloge suisse par la plus grande formation politique de l’opposition congolaise auront tué celle-ci à petit feu.
En 1992 pourtant, le pouvoir est à sa portée. Etienne Tshisekedi venait d’être triomphalement porté par la Conférence nationale aux fonctions de Premier ministre, le 15 août. Mais, alors que toute la presse congolaise et étrangère avait projeté le contour de son gouvernement, avec des poids lourds tels Kibassa Maliba, Tambwe Muamba, Birindwa ou encore Lihau comme ministrables, l’opposant historique va étonner aussi bien son propre monde que le Maréchal Mobutu. Il va s’enfermer dans son bureau de Limete et publier un Exécutif composé de parfaits inconnus. Dépités, ses partenaires de l’opposition, qui avait adopté le nom de guerre d’« Union sacrée », vont un à un déserter Limete et refaire les yeux doux à Mobutu. L’Union sacrée avait vécu.
Pire, à sa prestation de serment, le docteur en Droit – circonstances aggravantes – va biffer la mention relative au « Président-fondateur ». Il perd là le pouvoir légalement acquis au Palais du Peuple et va désormais présider ses Conseils des ministres sous les arbres de Limete, Mobutu ayant cadenassé ses bureaux de la Primature. Un dissident de l’UDPS, Birindwa, va être nommé à la place et va réunir dans son équipe la plupart des déçus de l’Union sacrée.

Ils ont dressé le lit de Laurent-Désiré Kabila

Mais, les hommes ne tirent finalement aucune leçon de l’histoire. En effet, d'un côté l'intolérance affichée par Tshisekedi et ses comparses, décidés de narguer le président Mobutu sans la moindre concession - "la place de Monsieur Mobutu est en prison", proclamera le lider maximo et, de l'autre, la détermination de Mobutu, qualifié désormais de tous les "noms d'oiseaux" mais décidé de se défendre bec et ongles pour conserver son pouvoir, le cocktail était suffisamment détonnant pour tapisser la voie à l’atterrissage d’un troisième larron : Laurent-Désiré Kabila et son AFDL.
Depuis, l’UDPS, et son leader « charismatique », va végéter d’opposition en opposition. Mais en décembre 2002, à la suite de la signature de l’accord de Pretoria sanctionnant le dialogue inter-congolais, une nouvelle opportunité s’offre à Etienne Tshisekedi pour rebondir sur la scène politique, avec la mise en place du gouvernement de transition ou gouvernement « 1+4 », qui sera effectif le 30 juin 2003. Alors que l’accord prévoit que le candidat à la vice-présidence de la république fasse acte de candidature au sein de sa plate-forme , le lider maximo va unilatéralement décider qu’il était « le seul opposant » et qu’en conséquence, le poste pour « l'opposition non armée » lui revenait de droit, sans daigner faire acte de candidature. Sa légendaire intransigeance lui sera encore fatale.
Si en 2006 il va boycotter l’élection présidentielle, il change le fusil d'épaule en 2011 mais manquera tout de même son rendez-vous avec l’histoire, à cause des tares accumulées tout au long du parcours de l'UDPS, que d'aucuns qualifient parfois de "parti tribal". Le lider maximo refusera de composer avec les autres opposants, depuis qu’il s’est autoproclamé « seul opposant congolais », alors qu’il pouvait négocier et, en amont, conclure un accord de gouvernement pour rester seul candidat de l’opposition face à celui du pouvoir, afin d'ainsi maximiser ses chances et minimiser les velléités de « fraudes massives », qu’il va ensuite décrier. Mais les dés étaient jetés.
A 82 ans et depuis plus d'une année en "convalescence" en Belgique selon ses proches, faut-il considérer aujourd’hui le vieil opposant comme un produit périmé ? En tout cas, il n’y a qu’un pas que plusieurs observateurs ont déjà allègrement franchi.

Cornelis Nlandu

Une rencontre de l'UDPS. Au milieu : Etienne Tshisekedi

Une rencontre de l'UDPS. Au milieu : Etienne Tshisekedi

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