Washington redoute des violences en RDC si Kabila s'accroche au pouvoir

Publié le par Jean-Cornelis Nlandu-Tsasa

Emeutes à Kinshasa en février 2015
Emeutes à Kinshasa en février 2015

Bruxelles/Washington, 20/08 - Les États-Unis redoutent des violences en République démocratique du Congo si le président Joseph Kabila s'accroche au pouvoir après la fin de son mandat en décembre, Kinshasa menaçant du risque de "chaos" en cas d'ingérence étrangère dans la crise, indique le site de la RTBF (Radio-télévision belge francophone) dans une dépêche datée du 17 août.

Cela fait des mois que Washington surveille comme le lait sur le feu la RDC, où le climat politique se tend à l'approche du 20 décembre, date du terme du second mandat du président congolais, auquel la Constitution interdit de se représenter, signale le site qui affirme que Joseph Kabila, qui a succédé au Mzee assassiné en 2001 avant d'être élu en 2006 et en 2011 chaque fois dans des circonstances controversées, est soupçonné par son opposition et des pays occidentaux de manœuvrer pour rester à la tête de la RDC, en cherchant à repousser éternellement la présidentielle.

Et de appeler qu'en mai, la Cour constitutionnelle a autorisé Joseph Kabila à demeurer à son poste si l'élection n'était pas organisée dans les temps. Un scénario qui semble de plus en plus probable. La Constitution dispose que "le scrutin est convoqué 90 jours avant l'expiration du mandat du président", soit le 19 septembre. Si bien que "le Congo est à un mois d'une crise constitutionnelle complète", s'est ainsi alarmé Anthony Gambino, ancien directeur à Kinshasa de l'USAID, cité par la RTBF.

"Plus on se rapproche de ces dates butoirs, moins les bons scénarios sont plausibles et plus les mauvais sont probables", a renchéri Thomas Perriello, émissaire du département d’État pour l'Afrique des Grands lacs. MM. Perriello et Gambino participaient cette semaine à une conférence de l'Institut Brookings sur la RDC, au côté de son ambassadeur à Washington, François Nkuna Balumuene. "Si nous ne trouvons pas de solution négociée, ces scénarios extrêmement préoccupants pourraient se traduire par de la violence", a prévenu M. Perriello.

Alternance démocratique en Afrique pour Barack Obama

Le responsable américain a rappelé que le président Barack Obama militait pour l'alternance démocratique en Afrique. "Les progrès démocratiques en Afrique sont en danger quand des dirigeants refusent de quitter le pouvoir à la fin de leur mandat", avait lancé M. Obama devant l'Union africaine en juillet 2015.

Dans un message largement répercuté par les médias, le président américain avait lancé, à l'adresse de ses homologues africains, que la Constitution des États-Unis lui interdisait de briguer un troisième mandat. Washington a ainsi exhorté, sans succès, les présidents burundais Pierre Nkurunziza et rwandais Paul Kagame à ne pas cracher sur la Loi fondamentale comme des vulgaires voyous pour s'accrocher au pouvoir.

La diplomatie américaine, selon la RTBF, veut que la règle s'applique aussi à Joseph Kabila. En 15 ans, le président de la RDC a eu "le mérite" de construire une "démocratie constitutionnelle", il a "maintenant l'occasion de tourner la page", a fait valoir M. Perriello qui a par ailleurs assuré que les États-Unis n'ont aucun "intérêt" dans la région, ni d'"animosité personnelle" contre tel ou tel dirigeant africain.

Implosion de la RDC

Devant l'institut Brookings, l'ambassadeur Balumuene a ainsi invoqué les difficultés sécuritaires et économiques sous la présidence Kabila, en particulier la lutte contre une rébellion tutsi soutenue par le Rwanda, le M23, vaincue fin 2013. Dans ce contexte, le diplomate congolais, incapable d'expliquer pourquoi Kinshasa n'a songé à débuter les préparatifs des élections qu'en 2016, a réclamé du "temps, après le 20 décembre, presque un an, pour préparer les élections", plaidant ainsi pour une "prolongation" du mandat de Joseph Kabila avant de promettre que le président sortant ne serait pas candidat à un nouveau mandat, alors que le principal intéressé reste muet sur le sujet.

Le diplomate congolais a aussi mis en garde contre un scénario catastrophe. Il a accusé "l'opposition et certains partenaires étrangers" de chercher à "utiliser la rue, une révolution de masse pour chasser le président Kabila" et, alors, "personne ne sera en mesure d'assurer l'après-chaos". "L'implosion de la RDC doit être évitée à tout prix (...). Il n'y a aucun intérêt à créer une deuxième Libye en Afrique centrale", selon l'ambassadeur.

Cinglante réplique aux propos de l'ambassadeur congolais

Alors que pour le représentant de Kinshasa, ce n'est pas Joseph Kabila et sa Majorité qui seraient responsable du chaos, ses propos surannés ont été suivis d'une cinglante réplique. M. Anthony Gambino, l'ancien directeur à Kinshasa de l'USAID lui a rétorqué que "la Constitution du Congo devait être respectée", que "la présidentielle devait avoir lieu, si ce n'est en 2016, le plus tôt possible en 2017", relève le site de la RTBF qui signale que ce même texte a également été publié sur Le Monde/Afrique, sous le titre « RDC : Les États-Unis redoutent les ambitions du président Kabila ».

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