Une interview qui fâche le Président Kabila

Publié le par Cornelis Nlandu-Tsasa

Presse - Politique

Le Président Kabila dément avoir accordé une interview à New York, alors qu'un entretien est largement diffusé
 
Kinshasa - Le Président de la République démocratique du Congo (RDC), Joseph Kabila, a démenti le mardi 2 octobre avoir accordé une interview à un journaliste ou à un organe de presse, national ou étranger, lors de son récent séjour à New York, aux Etats-Unis, dans un communiqué parvenu à l'APA.
Le quotidien kinois UHURU a rapporté dans son édition de mardi une interview attribuée au Chef de l'Etat congolais dans laquelle ce dernier déclare notamment avoir coupé "le cordon ombilical maléfique" avec l'Occident et fustigé la coopération de "duperie" avec le monde occidental. Ce journal est pourtant propriété d’un membre du gouvernement congolais, la vice-ministre Colette Tshomba, chargée des Congolais de l’Etranger, et qui figurait dans la longue suite de Joseph Kabila tant à Bruxelles qu’à New York.
"Ainsi donc, les propos recueillis par le journal UHURU paru le même mardi dans son numéro 1009 attribués au Chef de l'Etat Joseph Kabila sont fictifs et imaginaires, visent à ternir son image dans l'opinion et à contrarier la crédibilité de nos institutions", souligne le communiqué signé par son porte-parole de la présidence congolaise Kudura kabila-4.jpgKasongo, qui menace des "poursuites judiciaires" le journal UHURU ainsi que tout organe qui "relayerait ces allégations mensongères et outrageantes".
Le communiqué rappelle enfin qu'"il existe bien à la Présidence de la République des sources autorisées qui ont qualité pour pouvoir confirmer ou infirmer la véracité des faits allégués comme certains organes de presse ont à juste titre pu le faire".
Le Président Kabila a pris part la semaine dernière, à New York, à la 62ème Assemblée générale des Nations unies où il a notamment renouvelé sa détermination de mettre fin, par toutes les voies, à l'insécurité qui règne dans l'est de son pays.
 
Signée de Washington - alors même que Joseph Kabila ne s'y est pas rendu - par un journaliste indépendant, Jackson Wilson, certainement un pseudo, cette interview fictive, qui a atterri dans les rédactions de plusieurs journaux jusqu’en Occident par la magie des nouvelles technologies, fait jaser les milieux tant diplomatiques que des médias. 
Néanmoins, à la simple lecture des déclarations qu’elle contient, on se rend très vite compte qu’il s’agit d’un faux. On est donc en droit de poser la question de savoir comment le quotidien kinois UHURU a pu la publier sans émettre des réserves et prévenir ses lecteurs. Péché de jeunesse ou précipitation, croyant ainsi plaire au chef ? L’effet est plutôt catastrophique. 
Dans le souci d'éclairer nos nombreux lecteurs sur ce dont il s'agit, et donc pour que l'information soit complète, voici l’intégralité de cette interview fictive. Attention, il s'agit bien d'une interview fictive :
 
« Rencontre avec Joseph Kabila en marge de l’assemblée générale de l’ONU
Par Jackson Wilson, Journaliste Indépendant, Washington DC.
 
Mise en ligne le 26 septembre 2007
 
 Nous avons pu interviewer le président congolais Joseph Kabila. De la situation socio-économique, de l’insécurité et la reprise de la guerre à l’Est de la RDC, de l’immobilisme du gouvernement congolais, de la restriction des libertés individuelles, des présumés assassinats politiques, du retour hypothétique à Kinshasa de son rival le sénateur Jean Pierre Bemba, de l’accord de coopération avec la Chine… Notre interlocuteur a répondu à nos questions sans tabou.
 
Jackson Wilson : Monsieur le président, quel bilan faites-vous à plus de 300 jours de votre élection au suffrage universel ?
Joseph Kabila : Selon la nouvelle constitution de la RDC, le président n’est à aucun cas responsable de la situation économique, sociale et sécuritaire du pays. Vous devez poser cette question au Premier ministre Antoine Gizenga.
J W : Voulez-vous dire qu’il y a une véritable séparation du pouvoir en RDC ?
J Kabila : Bien évidement. Toutefois, il existe des domaines de collaboration entre la présidence et le gouvernement.
J W : Certains congolais ne sont toujours pas convaincus de votre filiation avec le défunt président Laurent Désiré Kabila. Du reste, ils continuent à suspecter votre participation dans la planification de son assassinat. Quelle est votre réaction ?
J Kabila : J’ai été élu à 58 % des voix au suffrage universel direct par des électeurs congolais. Cela suffit pour faire taire toutes ces mauvaises langues ! En outre, je suis marié à une congolaise du Bas –Congo. Le débat sur mes origines n’a plus aucun sens.
J W : Selon certains ONG’s, ces élections ont été entachées de plusieurs irrégularités en votre faveur. Notamment, la surveillance des plusieurs bureaux de vote à l’Est de la RDC, par les éléments rebelles rwandais du FDLR, Interamhwé, et les hommes du général dissident Laurent Nkundabatware, tous sont connus pour les massacres et viols contre la population civile. Tous ces rebelles déclarent  à qui veut l’entendre qu’ils ont participé à votre écrasante victoire électorale dans le Kivu ; le secrétaire général de votre parti politique le PPRD, Monsieur Vital Kamerhé déclara à un journaliste du jeune Afrique que votre épouse lui avait confié des valises pleines de dollars afin de corrompre les électeurs ; les éléments de votre garde personnelle ont attaqué à plusieurs reprises la résidence de votre rivale du second tour, avant et après les élections ; les chaînes de radio et télévision de l’opposition ont été brûlées, des journalistes assassinés ... Franchement, ces élections ont-elles été libres, démocratiques et transparentes ?
J Kabila : Concernant la présence des éléments rebelles dans les bureaux de vote, je vous dirai simplement qu’en politique les liens se font et se défont selon les intérêts. Quant aux déclarations de Vital Kamerhé, ce dernier a apporté des éclaircissements lors de ces suivantes sorties médiatiques. Il m’avait demandé pardon et je le lui ai accordé. Les incidents qui ont survenu pendant la période électorale doivent être placés dans leur contexte !
J W : Mais, vos hommes n’avaient pas hésité à tirer sur la résidence de votre rival le 21 août 2006, sachant très bien qu’il y avait les membres du CIAT, 15 Ambassadeurs en poste à Kinshasa dont plusieurs occidentaux ?
J Kabila : C’est très regrettable, mais on ne sait pas faire des omelettes sans casser des œufs.
J W : Que signifie cette expression ?
J Kabila : Ces diplomates se sont retrouvés au mauvais endroit et au mauvais moment. Ils sont allés dans cette résidence sachant que c’était une zone de combat. Je me demande s’ils n’ont pas voulu servir de bouclier humain ? Malheureusement pour eux, mes hommes avaient un travail à finir. D’ailleurs, leurs propres gouvernements n’ont pas exprimé leurs désapprobations. Les forces de l’union européenne et ceux de l’ONU présentes à Kinshasa nous ont facilités la tâche. Le rapport de l’ONU sur ces incidents est mis au placard ! L’affaire est close.
J W : Voulez-vous dire qu’il y a eu complicité internationale pour éliminer votre adversaire politique ?
J Kabila : Je vous laisse répondre à votre question.
J W : Le sénateur JP Bemba souhaite retourner en RDC et demande des garantis politiques et sécuritaires. Quelle est votre position ?
J Kabila : J’ai déjà eu à répondre plusieurs fois à cette question. La justice de mon pays est libre et indépendante, elle doit faire son travail. Quant aux garantis sécuritaires, je n’y peux rien. L’insécurité est généralisée, toute la population vit dans l’insécurité. Je ne peux pas garantir la sécurité d’un seul individu !
J W : Selon notre correspondant en RDC, l’opposition suspecte votre entourage de vouloir à tout prix obtenir une condamnation par défaut à l’encontre du sénateur JP Bemba et son inéligibilité à vie ? Ainsi, toutes sortes de charges et combines sont mises en branle afin que la justice face le reste ?
J Kabila : C’est de bonne guerre ! Regardez ce qui se passe en France dans l’affaire Clearstream. Le président Jacques Chirac et son premier ministre Dominique de Villepin, n’ont pas hésité à monter un dossier sur le candidat de leur propre camp en la personne de Nicolas Sarkosy !
J W : Mais l’affaire a mal tourné pour Jacques Chirac et Dominique de Villepin ?
J Kabila : La politique est un métier à risque, cher ami ! (Sourire)
J W : En matière des libertés individuelles et des droits de l’homme, la situation en RDC est devenue pire qu’avant les élections, selon HRW et Amnesty International ?
J Kabila : La situation politique dans mon pays est de loin meilleure par rapport à celle de la Birmanie, dont le régime militaire est soutenu à bras le corps par les Occidentaux ! Votre gouvernement retient des pauvres Musulmans en toute illégalité à Guantanamo ? La France et la Belgique ont construit des prisons sur les tarmacs de leurs aéroports internationaux. Les étrangers (hommes, femmes enceintes, nouveaux-nés, enfants et vieillards)  y sont enfermés sans jugement ! Vos militaires sèment la mort en Irak ainsi qu’en Afghanistan. Ces morts ne sont-ils pas des dommages collatéraux ?     
J W : Les pays occidentaux qui ont financé le processus électoral en RDC se sentent aujourd’hui flouer depuis que votre gouvernement a signé avec le régime chinois un accord de coopération pour un montant de 8,5 milliards de dollars. La Banque Mondiale et le FMI boudent cet accord. Que pensez vous des réactions de vos parrains occidentaux ?
J Kabila : Primo, je n’ai pas de parrains occidentaux. Les élections en RDC ont été libres, démocratiques et transparentes. Je suis un nationaliste africain et un panafricaniste convaincu. Ceux des occidentaux qui ont cru être mes prétendus parrains vont l’apprendre à leur dépend ! Je n’ai des comptes à rendre qu’aux électeurs congolais qui m’ont apporté leur confiance. Secundo, j’ai décidé de coopérer avec la Chine, malgré les pressions internationales, car c’est la 4ème puissance mondiale. Je dirai même que la Chine est en réalité la première puissance mondiale. Nous avons compris que la coopération bilatérale avec nos partenaires occidentaux traditionnels n’a été que duperie. L’exemple le plus frappant  est celui de l’accord de coopération avec la Belgique, signé juste après mon investiture, pour un montant de moins de 200 millions d’Euros sur 5 ans ! Ce petit montant, argent de poche, loin de nous aider à sortir du marasme économique, nous enferme dans un système de surendettement chronique, une forme de néocolonialisme sournois qui ne dit pas son nom. Nous avons compris qu’il fallait absolument couper ce cordon ombilical maléfique. Je peux vous assurer que Hugo Chavez et Fidel Castro sont mes models. Ils ont compris les vrais enjeux économiques internationaux, déséquilibrés, au détriment des pays du sud.  
J W : Vous me paraissez très sûr de vous ?
J Kabila : Je suis le président d’un pays qui est 80 fois plus grand que la Belgique et 8 fois plus grand que la France. Ces anciennes puissances coloniales doivent commencer à nous respecter. Vous avez vu se que la coopération militaire belge  a fait en RDC ? Au lieu de former nos hommes, elle nous a vendu du matériel de seconde main (armes, munitions, transporteurs des troupes...). Ces gens sont venus faire du commerce. En guise de remerciement, ils ont voulu me donner, sans raison, le tire de docteur honoris causa de l'Ecole Royale Militaire ERM de Bruxelles. L'armée congolaise est actuellement une coquille vide. J’ai à cet effet signé un accord de coopération militaire avec la Chine afin de doter mon pays d'une armée moderne et surtout de l’arme nucléaire d’ici 2011. Mon pays dispose de la plus grande réserve d’Uranium du monde. Notre Uranium est naturellement enrichi, j’ai bon espoir de disposer de la bombe nucléaire d’ici la fin de mon premier mandat. 
J W : La vente d’Uranium au régime iranien et Nord coréen n’est donc pas une fiction ?
J Kabila : Ecoutez, la RDC est un pays souverain. Personne ne peut venir nous dire ce qu’il faut vendre ou pas ! L’Uranium est un minerai comme les autres.
J W : L’accueil en demi teinte que les officiels Belges vous ont réservés lors de votre passage à Bruxelles le week-end passé est un prélude à …N’avez vous pas peur de finir exactement comme votre défunt père ?
J Kabila : J’ai pris mes dispositions.
J W : Quel est votre dernier mot ?
J Kabila : J’entends faire de mon pays la RDC, la première puissance économique, militaire et nucléaire de l’Afrique noire. La Chine va nous aider dans ce sens, n’en déplaise à certains. »
 
Par Jackson Wilson
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